• SC 601

    Tertullien

    De l'âme

    novembre 2019

    Introduction, texte latin, apparats et notes par Jerónimo Leal. Traduction par Paul Mattei.

     

    Ouvrage publié avec le concours du Centre National du Livre.
    Révision assurée par Guillaume BadyYasmine Ech Chael.
    ISBN : 9782204130004
    484 pages
    L'âme, les rêves, le sexe, l'embryon, la mort : Tertullien lance le débat chez les chrétiens (vers 210).

    Présentation

    Composé vers 210-211, le traité De l’âme de Tertullien est l’œuvre fondatrice d’un genre littéraire dans la littérature chrétienne. Se démarquant de Platon et se référant au stoïcisme, le polémiste latin s’y oppose aux tenants (gnostiques) de la préexistence et de la transmigration de l’âme. Parmi bien d’autres traits originaux, il défend notamment sa « corporéité » – il crée aussi tout un vocabulaire nouveau – qui font de l’œuvre un écrit sans précédent. Nourri des traditions médicales de son temps, il s’intéresse également à l’animation et au développement de l’embryon, au sexe de l’âme, au rapport de celle-ci avec le corps, et aux rêves. Théologien, il s’interroge sur la mort et sur le destin de l’âme après la mort.

    Entre philosophie, médecine, « psychologie », théologie et littérature, le traité du Carthaginois, ici introduit et traduit d’après un nouveau texte critique, est un ouvrage de référence pour les écrivains chrétiens ultérieurs comme pour la réflexion contemporaine.

    Jerónimo Leal, spécialiste de Tertullien, est professeur titulaire de patrologie et directeur du Département d’histoire de l’Église à l’Université Santa Croce, à Rome, et professeur invité à l’Institutum patristicum Augustinianum.

    Paul Mattei, professeur émérite à l’Université Lumière-Lyon 2 et professeur invité à l’Institutum patristicum Augustinianum, à Rome, est spécialiste de la littérature latine ancienne – en particulier de Tertullien, dont il a édité Le mariage unique et, en collaboration, Le voile des vierges (SC 343 et 424).

    Le mot des Sources Chrétiennes

    Le traité De l’âme, divisé en 58 chapitres, définit l’âme comme « née du souffle de Dieu, immortelle, corporelle, ayant une forme, simple par sa substance, ayant du sentiment par elle-même, douée de développements variés, libre de sa volonté, sujette à l’accident, changeante selon les tempéraments, rationnelle, souveraine, divinatrice, issue d’une seule » (ch. 22, 2, p. 273). Cette définition, en léger décalage par rapport à celle de Platon, intervient au terme de la première partie, systématique, de l’ouvrage (limites de la posture des philosophes ; qualités, organes et fonctions de l’âme), la seconde, diachronique, portant sur l’origine et le développement de l’âme, sur son destin à travers le péché, la mort et jusqu’aux fins dernières. Une attention particulière est prêtée à la réfutation de la doctrine platonicienne de la réminiscence, à la métempsychose et à la « métensomatose », mais aussi aux rêves, à l’origine du sexe de l’âme, à l’animation et au développement de l’embryon – des sujets qui rejoignent bien des préoccupations actuelles.

    De fait, « ce curieux traité où, selon H. Rondet, convergent toutes sortes d’idées venues de la révélation judéo-chrétienne, de la philosophie stoïcienne et de la science du temps » est celui qui a attiré le plus l’attention des historiens de la philosophie et de la médecine. Malgré des différences notables avec d’autres œuvres du même genre, ce traité se situe dans la vaste tradition « psychologique » en ses deux disciplines, philosophique ou médicale – l’influence majeure qui se fait sentir sur Tertullien étant le médecin Soranos d’Éphèse (IIe s. apr. J. C.).

    Avec ce traité, composé dans sa période montaniste vers 210-211 et se signalant par un recours aux Écritures et à la « règle de foi », Tertullien inaugure le genre « psychologique » chrétien qui a fait florès après lui (citons notamment le De anima et resurrectione de Grégoire de Nysse, le De anima et eius origine d’Augustin d’Hippone, le De anima de Cassiodore, paru récemment : SC585). En réalité il s’agit moins d’un traité philosophique que d’une œuvre polémique et d’une réfutation de certaines doctrines hérétiques, dans la ligne antignostique du Contre Hermogène. Tout en s’en prenant aux thèses de la préexistence et de la transmigration de l’âme, le Carthaginois met en avant – position aussi paradoxale que surprenante – sa « corporéité » : non au sens d’une matérialité de l’âme, comme chez Hermogène, mais parce que, pour lui comme pour les stoïciens, le mot corpus peut être synonyme de substance ; il y a donc un « corps de l’âme » comme il y a un « corps de chair ».

    Le texte, ici nouvellement établi, réserve à cet égard bien des surprises. Ainsi la formule selon laquelle « le principe dominant [de l’âme] est gardé dans le trésor du corps (thesauro corporis) » (ch. 15, 4, p. 224, ligne 11). Le « trésor du corps » : quel contraste avec le corps-tombeau ou le corps-prison de l’âme chez Platon ! Plutôt que d’y voir une simple variante, on se demande si, dans une page où il aborde les « secrets du cœur », Tertullien ne joue pas sur l’expression évangélique « trésor du cœur » (thesauro cordis, Lc 6, 45), en même temps que sur le double sens du mot « cœur » dans la Bible, où il est à la fois l’organe anatomique et le lieu psychique de la mémoire, pour montrer l’insertion corporelle de ce principe spirituel.

    Selon P. de Labriolle, « ce qui rend l’interprétation de ce traité particulièrement délicate, c’est la langue dont use Tertullien – langue d’une vigueur, d’un relief souvent admirables, mais où abondent les mots nouveaux, les expressions inédites ». On trouve, de fait, dans ce traité plus de cinquante mots dont il est l’unique attestation (hapax legomena) : fin connaisseur du grec et écrivain original, le Carthaginois y enrichit la langue latine non seulement dans le champ théologique, mais aussi philosophique.

    Dans ces conditions, et alors que la dernière version française remonte à 1841, on comprend aussi l’intérêt et l’enjeu de la nouvelle traduction en termes de fidélité, de lisibilité et d’apport à la compréhension de cette œuvre inaugurale – qui forme le 23e volume de Tertullien dans Sources Chrétiennes.

    Guillaume Bady

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