• SC 579

    Denys l'Aréopagite (Pseudo-)

    Les Noms divins. Chapitres V-XIII. La Théologie mystique

    juin 2016

    Noms divins : texte grec de B.R. Suchla (PTS 33) ; traduction et notes de Ysabel de Andia. — Théologie mystique : texte grec de A.M. Ritter (PTS 36) ; introduction, traduction, notes et index de Ysabel de Andia.

    Ouvrage publié avec le concours du Centre National du Livre et de l'Œuvre d'Orient.
    Révision assurée par Jean Reynard.
    ISBN : 9782204107907
    459 pages
    Un dépassement infini de l'esprit : la théologie mystique par excellence

    Présentation

    Datés du début du VIe siècle, ces deux traités témoignent de la forte influence de la tradition néoplatonicienne sur l’auteur, qui dissimule sa véritable identité sous le nom du disciple converti par Paul à Athènes. Le premier – le plus long écrit par l’auteur – examine les noms divins structurés par le mouvement de la procession, de la conversion et de la permanence. On ne peut nommer Dieu que par ses processions, car en tant qu’il est non-être et au-delà de l’être, il reste caché et au-delà de tout nom. L’auteur passe en revue les différents noms de Dieu : le bien, la lumière, le beau, l’amour, etc. Ces titres, qui jouent un rôle central dans le platonisme tardif, sont ici profondément christianisés.

    Le deuxième traité, la Théologie mystique, très bref, montre que l’union mystique, illustrée par l’entrée de Moïse dans la Ténèbre (Exode 19), transcende toute expression et activité des sens et de l’intellect, si bien que connaissance et ignorance de Dieu sont tenues pour identiques. La montée de Moïse sur le Sinaï représente l’ignorance de Dieu, mais sa redescente fonde la validité de la théologie positive. L’œuvre témoigne d’une tentative très élaborée de synthèse entre hellénisme et christianisme.

    Ysabel De Andia, directrice de recherches honoraire au CNRS, spécialiste d’Irénée et du Pseudo-Denys, a publié plusieurs ouvrages sur ce dernier auteur, dont les actes d’un colloque international qu’elle a organisé en 1994.

    Le mot des Sources Chrétiennes

    On est toujours impressionné par la haute tenue, l’immense postérité et la redoutable difficulté de l’œuvre du Pseudo-Denys l’Aréopagite. Après avoir il y a fort longtemps (1958) publié la Hiérarchie céleste, la Collection s’enrichit d’un second volume dionysien, qui comprend le grand traité des Noms divins, et celui, très court mais ô combien important, de la Théologie mystique. L’auteur mystérieux des alentours de l’an 500 qui a emprunté l’identité du disciple athénien converti par Paul à l’Aréopage (Actes 17, 34) est un néoplatonicien, disciple de Proclus, qui pense la foi chrétienne à partir des catégories du néoplatonisme tardif.

    Son traité des Noms divins est une approche de l’unité divine à partir de la multiplicité des noms ou attributs divins que sont Bien, Être, Vie, Sagesse, Puissance, qui sont autant de processions par quoi Dieu se révèle et peut être loué. L’approche est typiquement néoplatonicienne, appelant à un dépassement perpétuel (dépassement du sensible dans l’intellect, dépassement de l’intellect dans l’union au-delà de la connaissance) et introduisant le lecteur dans un cercle qui unit procession et conversion, Un et multiple, toujours pour revenir à l’Un, dont la transcendance est préservée au-delà de toute idée de participation. Le philosophe chrétien offre ainsi une nouvelle intelligence de la foi à partir d’une des écoles philosophiques les plus exigeantes et les plus achevées de l’Antiquité. Loin de n’être qu’une philosophie païenne mal convertie comme on l’a parfois dit, cette pensée fait l’effort de prendre au sérieux la philosophie, sans s’y enfermer comme si Dieu était le terme d’une remontée vers l’intelligible, en reconnaissant qu’il n’est pas accessible à l’intelligence. Celui qui donne un nom à Dieu n’a aucune prise sur lui comme dans la théurgie païenne, il sait que tout nom et toute connaissance prétendue risque d’être une idole. Dieu est l’inconnaissable, l’ineffable. Le croyant ne le possède pas, même intellectuellement, et ne peut que s’unir à lui comme à un inconnu, dans la ténèbre. Cette appréhension de Dieu comme l’Un au-delà de tout mot et de toute représentation humaine – fût-ce les mots et les images proposés par l’Écriture – ne peut que déboucher sur une théologie négative, puisque tout ce qu’on affirme de Dieu met en lui de la diversité, donc du multiple. La Théologie mystique qui suit les Noms divins est précisément l’un des manifestes les plus célèbres de la théologie négative qui a si profondément marqué l’histoire de la théologie chrétienne. Dans ces deux volumes les textes sont richement annotés, et précédés d’une abondante introduction qui montre en particulier l’immense postérité de l’œuvre jusqu’à l’époque moderne. Tous les mystiques chrétiens, y compris les modernes, de Jean de la Croix à Édith Stein, se sont expliqués avec lui – sans oublier auparavant les mystiques rhénans, et sans parler des philosophes qu’il a inspirés.

    Bernard Meunier

    Œuvre(s) contenue(s) dans ce volume

    Sur les noms divins, Chapitres V-XIII

    Le volume 579 contient les chapitres V à XIII. Ils traitent de l’être et des paradigmes (chapitre V), de la vie (chapitre VI), de la sagesse, de l’intellect, de la vérité et de la foi (chapitre VII), de la puissance, de la justice, du salut (chapitre VIII), du grand, du petit, du même, de l’autre (chapitre IX), du Tout-Puissant, de l’éternité, du temps (chapitre X), de la paix (chapitre XI), du Saint des Saints (chapitre XII), du parfait et de l’un (chapitre XIII).

    La théologie mystique

    La Théologie mystique qui suit les Noms divins est l’un des manifestes les plus célèbres de la théologie négative qui a profondément marqué l’histoire de la théologie chrétienne. Ce traité très bref montre que l’union mystique, illustrée par l’entrée de Moïse dans la Ténèbre (Exode 19), transcende toute expression et activité des sens et de l’intellect, si bien que connaissance et ignorance de Dieu sont tenues pour identiques. La montée de Moïse sur le Sinaï représente l’ignorance de Dieu, mais sa redescente fonde la validité de la théologie positive. L’œuvre témoigne d’une tentative très élaborée de synthèse entre hellénisme et christianisme.

    La Théologie mystique n’est pas le récit d’une expérience d’une expérience mystique personnelle. Le pseudo-Denys l’Aéropagite est d’abord un théologien qui veut s’effacer devant la présentation objective du mystère. Cependant, la « montée par négations » exposée par le traité  les Noms divins sont une grande « hymnologie » des attributs divins, la Théologie mystique est une « montée par les négations », qui sont encore des paroles, vers l’absence même de parole et la seule « théologie » qui convienne à Dieu est, au-delà de l’affirmation et de la négation, l’effacement de toute parole dans le silence. Cette montée se présente néanmoins comme une épure très abstraite d’un chemin anagogique vers l’union à Dieu. L’œuvre s’ouvre sur une prière et s’articule en cinq chapitres : « Ce qu’est la Ténèbre divine » ; « Comment il faut s’unir et adresser des hymnes à Celui qui est cause de tout et au-dessus de tout » ; « Quelles sont les théologies affirmatives et quelles sont les théologies négatives » ; « Qu’il n’est rien de sensible Celui qui est cause par excellence de tout le sensible » ; « Qu’il n’est rien d’intelligible Celui qui est cause par excellence de tout l’intelligible ».

    Extrait(s)

    Sur les noms divins (XII, 1-2, p. 157-159)

    Mais puisque tout ce qu’il fallait dire à ce sujet, à mon avis, a reçu la fi n qui lui convient, il nous faut célébrer Celui qui a des noms innombrables  à la fois comme Saint des Saints, Roi des Rois, régnant dans et pour l’éternité et au-delà, et comme Seigneur des Seigneurs et Dieu des Dieux. Et d’abord il faut dire ce que nous croyons être la sainteté, la royauté, la seigneurie, la divinité en soi, et ce que veulent nous manifester les Oracles par le redoublement des noms. Pour commencer, la Sainteté, selon notre façon de parler, est la pureté libre de toute souillure, parfaite et entièrement immaculée. La Royauté est la distribution de toute limite, ordre, loi et rang. La Seigneurie n’est pas seulement la supériorité sur les inférieurs, mais encore toute la possession parfaite et complète et la solidité véritable et inébranlable de ce qui est beau et bon. C’est pourquoi de kuros, autorité seigneuriale, viennent (les termes) kuriotès, la Seigneurie, kurion, celui qui a rang de Seigneur, et kurieuon, exerçant le pouvoir seigneurial. La Divinité enfin, c’est la Providence qui voit tout, qui par sa Bonté parfaite parcourt et contient tout, qui emplit d’elle-même et dépasse tout ce qui bénéficie de sa providence.

    La théologie mystique (IV, p. 311-313)

    Nous disons donc que la Cause de tout et qui est au-dessus de tout n’est ni sans substance, ni sans vie, ni sans parole, ni sans pensée, et qu’elle n’est ni corps, ni figure, ni aspect et qu’elle n’a ni qualité, ni quantité, ni masse. Elle n’est pas non plus dans un lieu, on ne la voit pas et elle ne comporte pas de toucher sensible. Ni elle ne perçoit, ni elle n’est perçue sensiblement, elle n’a pas non plus de désordre et de trouble, (comme si elle était) agitée par des impressions matérielles, elle n’est pas non plus dépourvue de puissance, (comme si elle était) sujette aux événements sensibles, elle n’est pas non plus privée de lumière. Changement, corruption, partage, privation, flux et quoi que ce soit d’autre de sensible, rien de cela elle ne l’est, ni ne l’a.

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