• SC 478

    Facundus d’Hermiane

    Défense des Trois Chapitres (À Justinien), tome II.1
    (Livres III-IV)

    novembre 2003

    Texte critique (CCL) par J.-M. Clément, o.s.b. et R. Vander Plaetse. — Introduction, traduction et notes par Anne Fraïsse-Bétoulières.

    Ouvrage publié avec le concours du Conseil Général du Rhône.
    Révision assurée par Dominique GonnetAimé Solignac.
    ISBN : 9782204073066
    208 pages
    Un empereur peut-il condamner des théologiens ? Au milieu du 6e siècle, un Africain réagit.

    Présentation

    Évêque d'Hermiane en Afrique du Nord, Facundus intervient avec toute son énergie et son talent rhétorique dans la querelle christologique dite des « Trois Chapitres » qui, au milieu du VIe siècle, aboutit à la condamnation de Théodore de Mopsueste, de Théodoret de Cyr et d'Ibas d'Édesse. Dans ce conflit, l'auteur de la Défense des Trois Chapitres présente en faveur des accusés des arguments solides, tant historiques que théologiques; mais l'intransigeance de l'empereur Justinien comme l'indécision et les revirements du pape Vigile provoqueront, à la suite de cette affaire, une dissension douloureuse et durable dans l'Église.

    Les livres III-VII constituent le centre de l'œuvre de Facundus. Les deux premiers concernent Théodore de Mopsueste. L'auteur réfute avec précision les attaques contre lui contenues dans le premier édit de Justinien (544-545) et montre l'orthodoxie de sa doctrine sur le Christ (III). Il situe ces attaques dans un contexte plus large : son maître Diodore de Tarse, loin d'être soupçonné, a reçu au contraire des lettres élogieuses de plusieurs évêques ; Théodore ne mérite pas non plus d'être condamné. Le recours au jugement du pape Vigile est inutile, car son opinion est déjà connue ; en outre, les signataires de l'édit impérial avouent avoir agi sous la contrainte (IV).

    L'ouvrage de Facundus, souvent cité ou résumé à son époque, est le document le plus complet, le mieux informé et sans doute le plus honnête que nous ayons sur cette querelle. Il nous transmet bon nombre de sources théologiques et politiques par ailleurs perdues et reflète la richesse idéologique et littéraire de l'Afrique chrétienne du VIe siècle.

    Anne Fraïsse-Bétoulières est maître de conférences de littérature et civilisation latines à l'Université Paul-Valéry de Montpellier.

    Le mot des Sources Chrétiennes

    Voici le deuxième tome, en deux volumes, de l’ouvrage de Facundus d'Hermiane, Défense des Trois Chapitres. On y trouvera les livres III à VII de cette longue défense de la mémoire de Théodore de Mopsueste, Ibas d’Édesse et Théodoret de Cyr, frappés d’anathème en 543 par un édit de l’empereur Justinien sous prétexte qu’ils auraient inspiré ou soutenu la doctrine hérétique de Nestorius, condamné par le concile d’Éphèse (431). A travers l’apologie des trois « antiochiens », l’intention qui guide Facundus n’est rien moins que de défendre l’enseignement de saint Léon et du concile de Chalcédoine (451) contre leurs adversaires monophysites. Les livres III et IV concernent presque exclusivement Théodore de Mopsueste, dont Facundus entend prouver qu’il est accusé à tort d’être à l’origine de l’hérésie de Nestorius ; les livres V à VII traitent du cas d’Ibas. Ce ne sont donc pas seulement des raisons pratiques qui ont conduit à séparer en deux volumes ce deuxième tome.

    Textes à l’appui – c’est aussi ce qui fait l’intérêt de l’ouvrage, étant donné la disparition d’une grande partie de l’œuvre du docteur antiochien –, Facundus démontre que Théodore ne mérite aucune des accusations calomnieuses répandues contre lui : il n’a jamais prétendu que le Christ n’était qu’un homme, même s’il a fermement distingué contre les hérétiques ariens la nature divine du Verbe incarné de sa nature humaine et insisté contre les apollinaristes sur la pleine humanité qu’il a assumée ; il n’a pas eu tort par conséquent de tirer toutes les conséquences de l’Incarnation en affirmant que le Christ avait connu toutes les faiblesses inhérentes à la nature humaine – la fatigue, la soif, la faim, la peur et l’angoisse – à l’exception du péché ; il n’est pas exact non plus qu’il ait refusé de reconnaître les prophéties messianiques, même s’il est vrai qu’il se montre sur ce point d’une grande exigence. Voilà donc quelques-unes des accusations que réfute Facundus, en interdisant aux détracteurs du docteur antiochien d’invoquer, pour les soutenir, les écrits de Cyrille d’Alexandrie contre Théodore et Diodore de Tarse : la fausseté des accusations portées par le patriarche alexandrin, qui veut faire d’eux les ancêtres directs de l’hérésie de Nestorius, est manifeste ; son hostilité à leur égard est comparable à celle qu’il a nourrie à l’égard de Jean Chrysostome, et pareillement indéfendable. Pour en faire la preuve, Facundus produit de nombreux témoignages patristiques – Basile de Césarée, Jean Chrysostome, Épiphane de Salamine, Jérôme notamment – en faveur de l’orthodoxie de Diodore, dont un autre titre de gloire est d’avoir été odieux à l’empereur Julien qui voyait en lui un obstacle à son entreprise de restauration du paganisme. Cette longue apologie de Diodore est essentielle dans sa démonstration, puisque Diodore fut le maître de Théodore de Mopsueste. Or, Facundus ne se lasse pas de le répéter, en invoquant l’autorité de Cyrille contre Théodore et Diodore, leurs accusateurs n’ont qu’un but : ruiner les définitions de Chalcédoine, remettre en cause le concile.

    Pour la même raison, il prend ensuite longuement la défense d’Ibas d’Édesse et de sa Lettre à Maris. Avec Théodoret et plusieurs autres antiochiens, Ibas avait été condamné au Brigandage d’Éphèse (449), mais son orthodoxie fut reconnue par le concile de Chalcédoine. Ses détracteurs monophysites, à l’époque de Justinien, s’employèrent toutefois à lui faire une réputation de nestorien et obtinrent la condamnation de la lettre par laquelle il rapportait à Maris, après l’acte d’union de 433, la querelle entre Cyrille et Nestorius et dénonçait l’impiété des douze anathématismes. Ces attaques contre Cyrille étaient, à leurs yeux, une preuve suffisante d’hérésie. Facundus s’emploie donc à montrer, à partir d’une analyse minutieuse de cette lettre, que les adversaires d’Ibas ont procédé à une présentation partisane de la lettre, en opérant des déplacements qui en modifient le sens. Du reste, contrairement à leurs affirmations, cette lettre a bien été reconnue orthodoxe par le concile de Chalcédoine, dont Facundus cite avec précision les Actes. En fait, s’ils le contestent, c’est parce qu’elle contient l’affirmation des deux natures et un éloge de Théodore de Mopsueste. Ils ne poursuivent d’autre but, en vérité, que la condamnation du concile de Chalcédoine et ils savent bien ce qu’ils font. Facundus dénonce ainsi leur tactique : « La piété de l’Église ne peut supporter que l’on déclare devoir condamner une lettre qu’un synode a approuvée, ou plutôt ce même synode parce qu’il l’a jugée orthodoxe. En effet, ils ont cherché à accuser et rejeter non seulement cette lettre d’Ibas comme nestorienne (…), mais aussi ses défenseurs qui disent qu’elle est orthodoxe et ne la placent pas sous anathème » (V, I, 3). Condamner les « Trois Chapitres », c’est-à-dire les écrits dogmatiques des trois antiochiens frappés d’anathème par l’édit de Justinien, c’est donc ruiner l’œuvre du concile de Chalcédoine. De Théodoret de Cyr, il est ici finalement peu question, sinon pour dire qu’il a effectivement siégé au concile et y a défendu un passage du tome de Léon à Flavien.

    Comme le précédent, ces deux volumes sont dus à Anne Fraïsse-Bétoulières (Université Paul-Valéry de Montpellier) et ont bénéficié de la révision du P. Aimé Solignac (Institut des Sources Chrétiennes). Le tome III, contenant les livres VIII à X, devrait paraître en 2004.

    Jean-Noël Guinot

    Œuvre(s) contenue(s) dans ce volume

    Défense des Trois Chapitres, Livres III-IV

    Les livres III-IV sont consacrés à la défense de Théodore de Mopsueste, le premier des accusés dans les Trois Chapitres, pour le laver du grief d’être le maître de Nestorius. Dans le livre III, où il réfute plusieurs accusations issues du Contra Diodorum et Theodorum dont il feint de croire qu’il n’est pas de Cyrille d’Alexandrie, Facundus répète d’abord qu’à travers les Trois Chapitres, c’est Chalcédoine lui-même qui est visé (et Léon avec lui) ; puis il resitue la pensée de Théodore dans son contexte antiarien et antiapollinariste, qui générait le souci de confesser l’humanité pleine et entière du Christ. Pour autant, le Verbe n’est pas en lui comme en un prophète et il n’est pas un pur homme : c’est un mensonge de lui prêter cette doctrine. Et si on lui reproche d’avoir dit que le Christ a tremblé dans sa Passion, on peut faire le même reproche à Léon, à Athanase et à Jean Chrysostome. La crainte de la mort fait partie de la nature humaine, elle est normale. D’autres accusations contre Théodore sont réfutées : il n’a pas dit que le Christ est un simple homme qui aurait reçu une puissance divine ; ni que Père, Fils et Esprit sont une seule personne, accusation faite à partir d’un symbole de foi qui lui est faussement attribué ; enfin, Théodore n’a pas nié les prophéties du Christ dans les livres de l’AT, même s’il a été plus prudent que d’autres pour appliquer certains textes au Christ.

    Le livre IV argumente sur la condamnation post mortem de Théodore : ceux qui la réclament ne réclament pas celle de Chrysostome comme Cyrille l'avait fait, pourquoi ne sont-ils pas cohérents ? On n’ose pas non plus accuser ouvertement Diodore, maître de Théodore, autre incohérence. Diodore fut approuvé par les Pères, y compris les archevêques d’Alexandrie. Longs extraits patristiques et textes impériaux en faveur de Diodore. Le pape Vigile a tenté de s’opposer à l’édit de Justinien qui condamne les Trois Chapitres, édit que beaucoup ont signé sous la contrainte.

    Extrait(s)

    (IV, I, 4-8, SC 478, p. 135-139)

    Cyrille a écrit à Atticus, évêque de Constantinople : « Ordonne d’enlever le nom de Jean du catalogue des évêques. En effet, si nous jugions que cela n’est rien, la communauté des apôtres souffrirait-elle que l’on compte le traître parmi eux ; or si on introduit le nom de Judas, ou placera-t-on celui de Mathias ? » (…)

    Ces très amères paroles du bienheureux Cyrille, contraires aux pensées chrétiennes, qu’oublieux de lui-même il répandit contre le plus suave Père de l’église, plus doux que le miel attique, nous sommes forcés, non sans tristesse, de les évoquer parce que certains veulent, pour nuire au concile de Chalcédoine, ressusciter des affaires déjà enterrées avec leurs auteurs et en raviver les conflits. En effet, qui n’aurait pas honte de rappeler que Cyrille n’hésite pas, ô impiété, à appeler Jean – alors qu’il était déjà mort, ce qui est plus cruel encore – Judas, Jéchonias et sacrilège (…), lui qui, pour conserver l’unité de l’église qu’il aima, préféra supporter le sacrifice de sa propre cause ?

    Errata

    Page

    Localisation

    Texte concerné

    Correction

    Remarques

    62

    Apparat critique

    SC. MARC. ANC.

    PSEUDO-ATHANAS.

    Voir errata SC 479 : "En marge de SC 478-479 (Facundus d’Hermiane) : l’attribution à Marcel d’Ancyre d’ouvrages pseudo-athanasiens a été rejetée, de façon définitive, dans M. Simonetti, Su alcune opere attribuite di recente a Marcello d’Ancira, in "Rivisita di storia e letteratura religiosa" 9 (1973), pp. 313-329"

    141

    l. 4

    saint

     

    saints

     

    211

    col. 1, l. 35

    V-VIII

    V-VII

     

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