• SC 446

    Clément d'Alexandrie

    Les Stromates. Stromate VI

    octobre 1999

    Introduction, texte critique, traduction et notes par Mgr P. Descourtieux.

    Ouvrage publié avec le concours de l'Œuvre d'Orient.
    ISBN : 9782204063487
    422 pages
    Le « larcin des Grecs », ou les prémices de l'ouvrage ultime de Clément sur le Maître divin, au tournant des 2e et 3e siècles.

    Présentation

    Un siècle à peine après la mort du dernier apôtre, Clément enseigne à Alexandrie, et sa foi chrétienne se trouve aux prises avec les différents courants qui traversent la philosophie païenne de son temps. Après les vigoureux appels la conversion lancés par le Protreptique, après les chatoyantes descriptions du Pédagogue, voici que les Stromates jettent les fondements d’une philosophie chrétienne, animée indissociablement par l’amour de la sagesse et par l’amour du Christ. « J’appelle philosophie, déclare l’auteur, l’union, en un seul tout, des doctrines irréprochables de chaque école philosophique et d’une vie qui soit en accord avec elles. » L’ensemble du Stromate VI pourrait être défini comme un hommage de l’intelligence humaine son Créateur. Loin de récuser la culture de son époque, Clément veut au contraire l’aider à donner le meilleur d’elle-même en dressant le portrait du « gnostique », chrétien accompli dont la foi s’épanouit en connaissance parfaite.

    Une telle pensée, riche, subtile et sans cesse à la recherche du Réel, n’est-elle pas profondément actuelle ?

    Ancien élève de l’École Normale Supérieure et agrégé des lettres, Mgr Patrick Descourtieux, prêtre du diocèse de Paris, est actuellement Recteur de la Trinité-des-Monts, à Rome, après avoir passé dix ans au service du Saint-Siège, à la Secrétairerie d’État.

    Le mot des Sources Chrétiennes

    Avec le Stromate VI de Clément d' Alexandrie (SC 446), dont l'édition est due à Mgr Patrick Descourtieux, ancien élève de l'École Normale Supérieure et dernièrement nommé Recteur de la Trinité-des-Monts à Rome, se poursuit la publication d'une des œuvres majeures de Clément. La richesse bigarrée et la composition apparemment très libre de l'ouvrage, s'ajoutant à une pensée souvent subtile, risquent au premier abord de dérouter davantage le lecteur que le Protreptique ou le Pédagogue. Qu'il se rassure ! Une Introduction, brève mais dense, lui donne les clefs qui lui permettront d'entrer sans difficulté dans ce Stromate et, pour le guider dans sa lecture, un plan détaillé qui révèle une composition beaucoup plus concertée que ne le laisse croire Clément lui-même.

    Une première partie prolonge et achève l'exposé sur le « larcin des Grecs » qui occupe la fin du Stromate V (SC 278 et 279). L'idée fondamentale, souvent reprise par les apologistes chrétiens, en est que les Grecs, pour composer leurs récits mythologiques, ont utilisé ceux de la Bible, dont ils ont pillé les enseignements, tout en dissimulant leur larcin. Ils ont du reste procédé de manière identique en se plagiant entre eux et en empruntant aussi certaines de leurs doctrines aux Égyptiens ou aux sages de l'Inde. Un grand nombre de citations, souvent tirées d'ouvrages aujourd'hui perdus, de poètes, d'auteurs dramatiques, de philosophes ou d'orateurs grecs, prétend apporter la preuve de ce larcin. Malgré leurs nombreux emprunts, les Grecs n'ont eu pourtant qu'une connaissance confuse de la vérité, même leurs plus grands philosophes. Mais, comme la Loi pour les Juifs, la philosophie, malgré ses insuffisances, demeure une alliance offerte par Dieu aux Grecs, un moyen mis par lui à la disposition de l'intelligence humaine pour l'amener à découvrir la Sagesse qu'est le Christ. Car Dieu veut sauver tous les hommes. Tel est le thème développé dans la deuxième partie qui s'achève sur la définition de la vraie philosophie et des vrais philosophes, ceux qui « sont épris de la connaissance du Fils de Dieu » et non seulement, comme les philosophes grecs, de la vertu. Or le seul maître, capable de conduire à la vraie sagesse, n'est autre que le Christ.

    Le gnostique, dont Clément entreprend de façonner « la statue » dans la troisième partie de son livre, de loin la plus longue et celle qui lui donne tout son sens, est précisément celui qui, par une ascèse purificatrice et par l'effort de son intelligence, s'engage sur le chemin de la connaissance de Dieu pour parvenir un jour à la contemplation de « la totalité entière ». Dans ce but, il sera un homme d'étude : loin de renoncer à la philosophie, il s'en servira pour se libérer des passions, pour étendre ses connaissances dans tous les domaines scientifiques, pour s'entraîner à la vertu en homme responsable de ses actes, bref pour atteindre la perfection et ressembler le plus possible à son Maître, le Christ. Alors il pourra appliquer pleinement son intelligence à la compréhension des Écritures, en pénétrer l'obscurité et l'expliquer, de manière à greffer sur le Christ aussi bien les Juifs que les philosophes païens. La contemplation de Dieu, telle que l'envisage le gnostique, ne s'obtient donc que par l'étude et l'exercice de l'intelligence appliquée aux Écritures. Au moment d'achever son livre, Clément souligne une dernière fois l'utilité de la philosophie pour le salut et, s'il en note encore les insuffisances, il en montre l'origine divine. « L'ensemble du Stromate VI, pour reprendre l'heureuse formule de P. Descourtieux, pourrait être défini comme un hommage de l'intelligence humaine à son Créateur. »

    La traduction élégante et fidèle de ce texte grec réputé difficile aidera le lecteur à découvrir la nature du vrai gnostique selon Clément. Si la quête qui est la sienne lui parait parfois trop exigeante, dans la mesure où son « gnostique s'occupe toujours des questions les plus importantes », il pourra, comme lui, pour se détendre un peu et occuper son loisir, s'adonner à la philosophie grecque, « comme on croque encore une friandise après le diner » ! Il comprendra mieux alors que, pour Clément, la nouveauté du christianisme se greffe à la fois sur la branche grecque de la philosophie grecque et sur la branche juive des Écritures : pour lui non plus il n'y a pas solution de continuité entre ces héritages.

    (J.-N. Guinot, 1999)

    Extrait(s)

    (p. 197)

    La philosophie est l’alliance de Dieu pour les Grecs

    67, 1. D’ailleurs, nous ne saurions nous tromper, si nous disons de manière générale que toute chose nécessaire et utile à la vie nous est venue de Dieu et que la philosophie a été donnée surtout aux Grecs comme une alliance qui leur est propre. En effet, elle est un marche-pied pour la philosophie selon le Christ, bien que les philosophes grecs fassent les sourds devant la vérité, par mépris de la langue des Barbares ou par crainte du danger de la mort que les lois de la cité tiennent suspendue au-dessus de la tête du fidèle.

    Elle a simplement été dévoyée

    67, 2. Comme dans la philosophie barbare, l’ivraie a été semée dans la philosophie grecque par le cultivateur habitué à l’ivraie. De là viennent, d’une part, les hérésies qui ont poussé chez nous avec le bon grain et, d’autre part, les hérauts de l’athéisme d’Épicure, du plaisir et de toute pensée opposée à la droite raison et semée dans la philosophie grecque, fruits corrompus de la terre donnée par Dieu aux Grecs pour qu’ils la travaillent.

    Errata

    Page

    Localisation

    Texte concerné

    Correction

    Remarques

    196

    n. 2

    Strom. II, 28, 1

    Strom. I, 28, 1

     

    336

    n. 4

    Le nombre 7 est symbolisé par une lettre qui a disparu

    Le nombre 6 est symbolisé par une lettre qui a disparu

    Il faut réécrire la note, suivant la note 1 p. 342 : c’est bien à 6, et non à 7, que correspond l’épisème, et c’est la seule façon de comprendre l’équivalence que pose Clément entre 7 et 6 !

    (A.-C. Baudoin)

    417

    Titre

    II.

    III.

     

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