• SC 419

    Richard de Saint-Victor

    Les Douze Patriarches
    Beniamin minor

    février 1997

    Texte critique et traduction par Jean Châtillon (†) et Monique Duchet-Suchaux. — Introduction, notes et index par Jean Longère.

    Révision assurée par Bernard de Vregille.
    ISBN : 978-2-204-05610-6
    374 pages
    Indisponible chez notre éditeur
    L'histoire des patriarches, ou l'Écriture comme miroir pour l'homme, par un écrivain du 12e siècle.

    Présentation

    Richard, auteur de ce traité, fut, de 1162 à 1173, prieur de l'abbaye parisienne des Chanoines réguliers de Saint-Victor, centre renommé d'études théologiques et spirituelles. Son œuvre est considérable : commentaires scripturaires, traités de théologie, dont le fameux De Trinitate, ouvrages et opuscules spirituels, sermons et lettres.

    Le Beniamin minor tient à la fois du commentaire biblique et du traité spirituel, puisque c'est à travers une présentation des douze fils de Jacob, de leurs mères et de leur sœur Dina, que Richard expose le déroulement de la vie ascétique et mystique. Il a pour cela recours aux étymologies des noms de chaque personnage et au sens figuratif prêté à chacune des bénédictions prononcées par Jacob sur ses fils.

    Pareille méthode a de quoi dérouter le lecteur moderne, peu familier avec une telle symbolisation des aspects et des temps forts de la vie chrétienne. Il ne doit pourtant pas se laisser arrêter par ce qu'une telle méthode a d'artificiel. En lisant Richard, il doit sans cesse se souvenir que pour celui-ci, comme pour ses contemporains, l'Écriture sainte est, plus qu'une histoire d'événements passés, une réflexion inspirée sur Dieu et sur l'homme, où tout est chargé de sens. Elle est « le miroir » qui permet à l'homme intérieur de savoir qui il est et d'entrevoir la vie de contemplation à laquelle Dieu l'appelle. D'où la grande beauté de bien des passages de ce Beniamin minor.

    Jean Châtillon († 1988) a enseigné la philosophie médiévale à l’Institut catholique de Paris. Spécialiste des Victorins et de l’histoire canoniale, il a édité plusieurs traités de Richard de Saint-Victor.

    Monique Suchet-Suchaux est ingénieur de recherche honoraire au CNRS (Comité du Cange).

    Jean Longère, directeur de recherche au CNRS, est l’auteur de travaux sur la théologie spirituelle et pastorale du Moyen Âge.

    Le mot des Sources Chrétiennes

    Richard, venu d'outre Manche et entré chez les chanoines réguliers de S. Victor de Paris, a joué un rôle important dans cette abbaye, dont il fut prieur, et nous avons conservé de lui deux lettres attestant qu'il est directement intervenu dans le conflit qui opposa Thomas Becket au roi Henri II. Pourtant l'histoire contemporaine ne tient aucune place dans ce traité, un de ses ouvrages les plus diffusés.

    Il s'agit bien de l'histoire de Jacob et de ses deux épouses, Lia et Rachel, et de celle de ses enfants, dont le dernier, Benjamin, a donné un de ses titres à l'ouvrage, mais c'est une histoire ressaisie tout entière à travers le prisme de l'interprétation allégorique. Les Pères des premiers siècles, après Philon d'Alexandrie, avaient déjà largement exploré cette voie, sur laquelle s'engage après eux Richard. Sans doute ce mode de lecture, qui connut alors un grand succès, peut-il aujourd'hui nous paraître déroutant. En réalité, l'histoire de Jacob, de ses épouses et de ses douze fils est à lire comme un itinéraire spirituel, une progressive ascension de l'âme vers Dieu. L'Écriture est moins pour Richard une histoire d'événements passés qu'un « miroir » qui permet à l'homme intérieur de se connaître et d'entrevoir la vie de contemplation à laquelle Dieu l'appelle.

    Cette édition reproduit le texte latin et la traduction qu'avaient préparés le Père Jean Châtillon. L'un et l'autre ont été revus par Monique Duchet-Suchaux et Jean Longère, à qui l'on doit également l'Introduction et les notes. Le Père Bernard de Vregille s'est chargé de l'index et de l'ultime révision.

    Jean-Noël Guinot

    Œuvre(s) contenue(s) dans ce volume

    Le Beniamin minor, consacré au dernier des fils de Jacob dans la Genèse, est un ouvrage sur la contemplation, comme le Beniamin maior que l’auteur a composé ensuite. Sous ce nom, c’est en fait des douze fils de Jacob que l'auteur propose une lecture « tropologique », c’est-à-dire morale. Dans une interprétation allégorique de cette section de la Genèse, Richard reprend la lecture faite par nombre de ses prédécesseurs antiques et médiévaux, où les deux épouses de Jacob, Lia et Rachel, figurent respectivement la vie active (désir de la justice) et la vie contemplative (désir de la sagesse). Le traité mène ainsi toute une réflexion sur l’intériorité humaine, le rôle de la raison et de l’affection, l’ascension spirituelle de l’âme qui atteint la contemplation. Il en décrit la progression d’abord en fonction des objets contemplés et de l’activité contemplative, ensuite en fonction des effets de celle-ci.

    Le Beniamin minor est l’un des ouvrages les plus diffusés de Richard, il est transmis par environ 150 manuscrits, sous deux formes ; il est soit divisé en paragraphes (env. 21 en général : c’est la forme la plus représentée dans les manuscrits les plus anciens, XIIe – XIIIe siècle), soit divisé en chapitres (86 ou 87), forme un peu plus récente mais qui pourrait, comme la première, remonter à Richard lui-même.

    Rachel est la contemplation de la vérité, que nous atteignons par la raison servie par l’imagination, Lia la pratique de la justice, que nous atteignons par l’affection servie par la sensibilité. Les sept affections de l’âme (les sept fils de Lia), ordonnées au bien. Rôle des différentes formes d’imagination. Les deux spéculations par lesquelles nous progressons. Comment les vertus (abstinence, obéissance, patience, joie, douceur etc.) nous aident dans notre progression. La haine des vices, la honte et son bon usage. Déviances possibles dans la pratique des vertus, moyens de s’en garder ou de les réparer. Souffrance et espérance. Les affections doivent être à la fois ordonnées (au bien) et modérées (maîtrisées). Du mauvais usage de la crainte. La discrétion (le discernement). Discrétion et contemplation, filles de la raison. De la connaissance de soi à la contemplation de Dieu. Les contemplations spirituelles. La grâce. Pas de révélations sans l’écriture. L’esprit mû par Dieu. Fin de la contemplation.

    Extrait(s)

    chap. 69 (SC 419, p. 289-291)

    C’est la discrétion [le discernement], en effet, qui montre la direction à suivre à ce soleil de l’intelligence, à cet œil intérieur du cœur qu’est l’intention de l’esprit ; c’est par la discrétion, d’où elle tire son origine, que la subtilité de l’esprit elle-même s’aiguise ; c’est par la discrétion qu’une règle est imposée à toute la communauté fraternelle des vertus, comme à chacune d’entre elles, et s’il en est une qui n’acquiesce pas à son conseil, qui ne respecte pas la discrétion, elle perd aussitôt le nom de vertu.

    Autre extrait

    Que l’homme gravisse donc le sommet de son cœur (Ps 63, 7), qu’il fasse l’ascension de cette montagne, s’il veut saisir, s’il veut connaître ce qui est au-dessus de toute compréhension humaine. Qu’à travers lui-même il monte au-dessus de lui-même. Que par la connaissance de soi il parvienne à la connaissance de Dieu. Que l’homme apprenne d’abord dans l’image de Dieu, qu’il apprenne dans la ressemblance de Dieu ce qu’il doit penser de Dieu. L’ascension de la montagne, on l’a dit, se rapporte à la connaissance de soi ; ce qui se passe au sommet de la montagne transporte vers la connaissance de Dieu. Il n’y a pas de doute que celle-là appartienne à Joseph, celle-ci à Benjamin. Il est nécessaire que Joseph vienne au monde avant Benjamin. L’esprit qui ne s’élève pas jusqu’à la connaissance de lui-même, quand donc prend-il son vol, sur les ailes de la contemplation, vers ce qui est au-dessus de lui-même ? Le Seigneur est descendu sur cette montagne, Moïse en a fait l’ascension. C’est sur cette montagne que le Seigneur a donné ses instructions pour la construction du tabernacle et que Moïse en a été instruit.

    Errata

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    Remarques

    -2

    Dernière ligne

    ne procède d’une volonté bonne

    ne procède pas d’une volonté bonne

     

    25

    n. 1

    Mattheo

    Matheo

     

    39

    l. 18

    Lia c’est l’amour du prochain

    Lia, c’est l’amour du prochain

     

    40

    l. 8

    le conduite

    la conduite

     

    42

    n. 4

    (BGPTM, XIX, 4) Münster

    (BGPTM, XIX, 4), Münster

     

    44

    l. 11

    enfant

    fils

     

    49

    l. 3

    cete œuvre

    cette œuvre

     

    49

    l. 8 en partant de la fin

    eficace

    efficace

     

    52

    l. 5 en partant de la fin

    une essence pure et simple

    une essence une et simple

     

    62

    l. 7

    généralement au nombre de vingt et un

    généralement au nombre de vingt trois

     

    73

    l. 14

    p.5

    p. 12

     

    73

    l. 4 en partant de la fin

    RICHARD OF SAINT-VICTOR, The Mystical Ark Book three of the Trinity. Translation and Introduction, by GROVER A. ZINN. Preface by Jean CHÂTILLON, New York, Ramsey-Toronto, 1979, 425p.

    RICHARD OF SAINT-VICTOR, The Twelve Patriarchs, The Mystical Ark Book three of the Trinity. Translation and Introduction, by GROVER A. ZINN. Preface by Jean CHÂTILLON, New York, Ramsey-Toronto, 1979, 425p.

     

    73

    l. 5 en partant de la fin

    Ansbax

    Ansbach

     

    73

    l. 12

     

     

    Éditions du "Benjamin minor" antérieures à 1508

    • dans HUGUES DE SAINT-VICTOR, Didascalicon, etc., in-f°, Strasbourg (H. Eggestein ou G. Reyser), pas après 1474 : Tractatus Hugonis de Lya et Rachel uxoribus Iacob et de concubinis eius Bala et Zelpha et filiis eius et filiabus, Bibl. Mazarine, Inc. 302
    • Benjamin minor, in-4°, Paris (J. Bonhomme), 1489 : B. N., Rés. D. 9604 ; Bordeaux, B. M., Inc. 242 ; Lyon, B. M., Inc. 1022 ; Bourges, B. M., Inc. 48 ; Troyes, B. M., 408 et 420
    • De duodecim patriarchis, in-8°, Bâle (J. Ammerbach), 1494 (en même temps que le De arca mystica) : B. N., Rés. C. 4675 (1) ; Mazarine, Inc. 533 ; Sorbonne, 153 ; Troyes, B. M., 609 ; Valognes, B. M., R-205

    Les deux dernières sont bien signalées par DUMEIGE, p. 472 ; la 2e par HUGONIN, PL 196, c. XIV

    80

    l. 7 en partant de la fin

    dire

    diri

     

    103

    l. 19

    Mais il est clair que sans l’imagination elle ne saurait rien des réalités corporelles

    Mais il est clair que, sans l’imagination, elle ne saurait rien des réalités corporelles

     

    109

    n. 2, l. 3

    l’exégèse de Cantique des Cantiques

    l’exégèse du Cantique des Cantiques

     

    109

    n. 2, l. 11

    La Haye

    Copenhague

     

    111

    l. 8 en partant de la fin

    première née

    première-née

     

    111

    l. 5 en partant de la fin

    mais aussi, attentivement.

    mais aussi attentivement.

     

    117

    n. 2

    p. 358-365.

    p. 358-365. [Nouum Glossarium]

     

    121

    l. 17

    Tels sont

    Telles sont

     

    123

    l. 14

    qui aime véritablement accomplit avec joie

    qui aime véritablement, accomplit avec joie

     

    125

    l. 7 en partant de la fin

    elle même

    elle-même

     

    133

    l. 21

    Chaque fois dès lors qu’à partir

    Chaque fois, dès lors, qu’à partir

     

    135

    l. 11

    l’union

    l’étreinte

     

    143

    l. 22

    abondonnons

    abandonnons

     

    182

    n. 1

    cf. supra XXVI, n. 2.

    cf. supra XXVI, p. 161, n. 2.

     

    193

    l. 18

    par qui on entre dans la joie

    qui font entrer dans la joie

     

    195

    l. 11

    comparées avec elles

    comparées à elles

     

    205

    l. 13

    excellenten

    excellente

     

    208

    n. 3

    Cf. supra XXVI.

    Cf. supra XXXVI.

     

    212

    n. 1

    Cf. supra XI et XXVI.

    Cf. supra XI et XXXVI.

     

    213

    l. 15

    Zabulonc

    Zabulon

     

    241

    l. 2

    quui

    qui

     

    259

    l. 6 en partant de la fin

    soig

    soi

     

    263

    l. 15

    rougir à cause de Dieu du déshonneur subi

    rougir, à cause de Dieu, du déshonneur subi

     

    263

    l. 18

    devant Dieu pour ce qui demeure caché

    devant Dieu, pour ce qui demeure caché

     

    273

    l. 15

    honteuse

    honteuses

     

    275

    l. 2-3

    Sans la crainte nous ne renonçons jamais à notre mal, sans elle nous ne commençons même pas à faire le bien.

    Sans la crainte, nous ne renonçons jamais à notre mal, sans elle, nous ne commençons même pas à faire le bien.

     

    277

    l. 14

    De la prépondérance de la crainte et des autres affections

    De la prépondérance de la crainte, et des autres affections

     

    293

    l. 16

    le frappe avec dureté

    la frappe avec dureté

     

    298

    l. 1

    factam

    factum

     

    299

    l. 6 en partant de la fin

    L’esprit

    L’âme

     

    317

    n. 2

    « s’il n’était pas oublieux de son origine, il reconnaîtrait, à propos de tout ce qui est exposé au changement que ce n’est rien ». Disascalion

    « s’il n’était pas oublieux de son origine, il reconnaîtrait, à propos de tout ce qui est exposé au changement, que ce n’est rien ». Didascalion

     

    327

    l. 20

    figure

    figuré

     

    329

    l. 1

    Il faut en conclure que si ici il a été dit en toute vérité

    Il faut en conclure que, si ici il a été dit en toute vérité

     

    329

    l. 16

    mois

    moins

     

    329

    l. 19

    il se complait aussi dans le saint Esprit

    l’Esprit saint aussi se complait

     

    360

    l. 13

    demulco

    demulceo

     

    369

    l. 10 en partant de la fin

    subortior

    suborior

     

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