• SC 175

    Césaire d’Arles

    Sermons au peuple, tome I
    (Sermons 1-20)

    décembre 1971

    Introduction, traduction et notes par Marie-José Delage.

    Ouvrage publié avec le concours du Centre National de la Recherche Scientifique.
    ISBN : 9782204038171
    506 pages
    La vie quotidienne d'un chrétien en Provence au 6e siècle, à travers 80 sermons pastoraux.

    Présentation

    Dans ses sermons, Césaire d’Arles n’est pas guidé par l’ambition littéraire : il compose ses recueils pour suppléer à l’incapacité des prêtres et des évêques de son temps, ne visant qu’à un enseignement élémentaire et à une culture chrétienne « de masse ». Les sermons donnent une image vivante des mœurs et coutumes de l’époque, de la vie familiale aux spectacles et aux superstitions païennes.

    Le texte critique est repris avec un apparat allégé de l’édition dans le Corpus Christianorum (1953), sauf le Sermon 1, issu de la collation d’un nouveau manuscrit de la Bibliothèque municipale de Bordeaux.

    Marie-José Delage, après avoir été à Paris l'élève de l'historien Henri Marrou, enseigne la littérature française dans une université américaine (Smith College, MA), où elle poursuit ses recherches sur les origines chrétiennes en Gaule.

    Le mot des Sources Chrétiennes

    Sermons au peuple

    Césaire, évêque d’Arles entre 503 et 542, fut un grand prédicateur : il prêchait les dimanches et les jours de fête, mais aussi en semaine et… jusque dans son sommeil (Vie de Césaire I, 55, p. 319) ! Surtout, il constitua des recueils de sermons « passe-partout », adaptés aux besoins des paroisses et destinés aux prêtres dans l’incapacité de prêcher. Il utilisa dans ce but tout le matériel à sa disposition : sa mémoire, et sa bibliothèque, nourrirent son inspiration, quand il ne reprit pas simplement un sermon d’Origène, d’Augustin ou d’un autre Père, au besoin en le simplifiant. L’identification des sermons de Césaire est donc tâche ardue. Ils ont été transmis le plus souvent de façon anonyme, ou sous le nom du Père auquel il empruntait le principal de la matière, dans des collections dites « arlésiennes » ou dans des homiliaires, où ils côtoient des pièces d’autres origines.

    C’est à Dom Germain Morin, bénédictin de l’abbaye de Maredsous, que l’on doit d’avoir, durant la première moitié du xxe siècle, restitué à l’évêque d’Arles plus de la moitié des sermons à lui aujourd’hui attribués. Ces sermons furent classés en cinq catégories : les Admonitions, sur des sujets divers, les Sermons sur l’Écriture, le Temps, les Saints et les Sermons aux moines. Ce volume reprend son édition, publiée pour la première fois en 1937, et reproduite dans le Corpus christianorum. Series Latina 103 et 104 en 1953 ; l’apparat critique a été refondu.

    La datation et la localisation des Admonitiones sont la plupart du temps impossibles : Césaire expurgeait ses sermons de tout ce qui, les enracinant dans un contexte donné, aurait rendu plus difficile leur réutilisation.

    Césaire d'Arles, soucieux de faire fructifier la foi chrétienne parmi des populations encore imprégnées de paganisme et soumises aux malheurs de la guerre, envoyait des recueils de ses sermons dans toutes les paroisses de son diocèse. L’objectif des Admonitiones est encore plus précis : mettre à la disposition des évêques et des prêtres une catéchèse élémentaire mais solide, recouvrant les principaux aspects de la vie chrétienne. Elles renferment tout ce que l'évêque tenait pour essentiel : les croyances de l'Église, impliquant le sérieux de l'engagement baptismal (tome I) ; ses exigences morales, dont le rigorisme n'entache pas l'idéal évangélique de miséricorde (tome II) ; enfin, les efforts pastoraux déployés pour aider les hommes pécheurs à se dégager du mal par la pénitence et la prière commune afin de parvenir en paix aux portes de la mort (tome III). Tous ces exposés dogmatiques, tous ces conseils pratiques se situent concrètement dans la Gaule tourmentée du vie siècle.

    Tissés de réminiscences ou d’extraits patristiques soigneusement sélectionnés, ces quatre-vingts sermons en général assez courts (un quart d’heure environ) s’organisent autour d’une idée principale, tirée de la morale pratique ou de la vie quotidienne. Le ton est presque toujours celui d’un entretien familier, et non d’un enseignement magistral. La langue en est simple mais aussi exacte que celle de ses contemporains, le vocabulaire, précis et vigoureux. Le style vivant révèle deux aspects de la personnalité de l’orateur : la sensibilité et la chaleur humaine, ainsi que le sérieux et la dignité. Plusieurs procédés pédagogiques rendent le contenu accessible aux plus simples, tout en obligeant chacun à prendre parti : interrogations, exclamations, apostrophes et dialogues fictifs, exemples tirés de la vie quotidienne, parallélismes et répétitions. Les images sont rares et les métaphores, réservée au style d’apparat. En revanche, antithèses, assonances et allitérations, jeux de mots et de sons foisonnent ; l’usage des clausules montre la sensibilité de Césaire au rythme.

    Œuvre(s) contenue(s) dans ce volume

    Sermons au peuple 1-20

    Le « Sermon » 1, rédigé après le concile d’Agde en 506 et probablement peu avant celui de Vaison en 529, est une longue lettre-circulaire adressée à d’autres évêques, sans doute pour les inciter à voter certains canons au prochain concile. Césaire les exhorte à se consacrer à la « culture spirituelle » (Serm. 1, 5, p. 231), spécialement par la prédication, auquel chacun devrait se livrer selon ses capacités et pour laquelle il usera au besoin des sermons des anciens Pères. Le Sermon 2 servait quant à lui de préface à l’un des premiers recueils de sermons destinés à la diffusion. Les Sermons 3-12 rappellent aux auditeurs la nécessité de connaître les vérités de foi et de se nourrir de la lecture de l’Écriture. Les Sermons suivants (14-20, mais le thème court jusqu’au Sermon 34) engagent à traduire cette foi par la pratique des bonnes œuvres, de la charité et de l’aumône.

    Si quelques sermons sont repris à l’un ou l’autre Père (spécialement le Sermon 3, sur le Quicumque, attribué à Athanase), la plupart des pièces sont de la main de Césaire. Elles permettent donc de découvrir le « principal mérite » de Césaire, qui « n’est pas d’ordre littéraire » : « il est dans cette humilité et cette attention à autrui qui lui permettent de s’effacer devant ce qu’il a à dire et de se faire “tout à tous” ; il est aussi dans cette tenue qui l’empêche de confondre simplicité et relâchement » (p. 208).

    Extrait(s)

    Sermon 1, 13, SC 175, p. 251-253.

    Ces conseils et beaucoup d’autres semblables, je ne sais s’il existe un évêque, un prêtre ou même un diacre incapable de les prêcher dans l’église et de les rappeler en tout lieu. Ni éloquence, ni grande mémoire, ne sont requises là où on sait que convient une simple monition dans un langage sans apprêt. Si quelqu’un nous prend notre fortune terrestre, nous osons donner des conseils avec la plus grande autorité à des juges très puissants et à des avocats versés dans le droit, afin de pouvoir récupérer notre bien sur l’usurpateur ; et nous nous disons incapables d’adresser à notre pauvre peuple tout simple, avec des mots de tous les jours ! Pourquoi crions-nous pour la terre ? Parce que nous aimons la terre. Pourquoi ne crions-nous pas dans les églises ? Je n’ai pas osé le dire, mais pourtant la vérité me contraint de parler : nous ne crions pas dans l’Église parce que nous n’aimons pas spirituellement le peuple qui nous est confié. […]

    Si quelque passant s’apercevait que ta bête est en danger, attaquée par les loups et s’il se taisait sans venir à son secours, je pense que tu le lui reprocherais et que tu ne dirais plus qu’il est ton ami. Mais nous, qui voyons si souvent les brebis de notre Seigneur blessées du poison de l’envie ou étouffées par le bourbier de la luxure ou plongées dans le cloaque de l’ivresse ou enchaînées par toutes sortes de péchés, comment nous présenterons-nous devant Dieu, si nous ne crions pas, si nous ne défendons pas, si de tout notre pouvoir, par des blâmes, des réprimandes, des punitions sévères si c’est nécessaire, nous ne nous efforçons pas de les écarter de la fosse de le perdition et de les rappeler de l’abîme des vices ?

    Errata

    Page

    Localisation

    Texte concerné

    Correction

    Remarques

    189

    Intro., l. 23

    (19,6)

    (39,6)

     

    226

    n. 1

    33, 6

    34, 6

     

    256

    § 15 l. 22

    in nostri

    in nostris

     

    307

    Sermon V, 1, l. 15

    ils

    il

     

    341

    Sermon 7, 1, l. 16

    seront

    serons

     

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